Joyce coud des jupes à rubans traditionnelles, et chacune d'elle raconte une histoire. « Nous sommes tous ici pour raconter une histoire et tout ce qui se trouve sur votre jupe à rubans raconte votre histoire, explique Joyce. Chaque jupe à rubans représente la personne qui la porte — chaque Nation et chaque personne veut être représentée par ce qui lui tient à cœur. »
Les jupes à rubans sont portées traditionnellement par les membres des Premières Nations et les Métis et représentent un lien direct avec la Terre mère. Elles sont généralement portées pour les occasions spéciales, notamment les cérémonies, les mariages, les remises de diplôme et d'autres événements de vie importants.
En 2020, Isabella Kulak, membre de la Première Nation Cote en Saskatchewan, a été humiliée pour avoir porté une jupe à rubans à son école primaire. L'intervention et le soutien des Autochtones et des non-Autochtones de tout le pays ont été palpables et ont entraîné la création de la Journée nationale de la jupe à rubans, célébrée chaque année le 4 janvier.
Joyce, une survivante de la rafle des années 60, est née et a grandi à Fort McMurray, en Alberta. Elle a passé son enfance en foyer d’accueil, où elle a appris à coudre. « Je me retrouvais toujours à la maison de Mme Wilson, dit-elle. C'était une femme des Premières Nations. Elle ne m'a jamais laissée entrer dans sa salle de couture, peut-être parce que j'étais trop jeune, mais je me souviens de l'avoir observée par la porte et d'avoir tout assimilé. »
Lorsque la fille de Joyce a démontré un intérêt à apprendre la danse traditionnelle, elle a fait appel aux connaissances apprises en regardant Mme Wilson et a appris par elle-même à faire des robes à franges, et ensuite des jupes à rubans et d'autres vêtements de cérémonie.
« J'ai deux mains et une machine, dit-elle. La machine veut toujours coudre en ligne droite, mais tu dois apprendre à la manipuler pour que ta jupe puisse raconter une histoire. »
En plus des histoires qu'elle coud sur les jupes à rubans, elle coud une note et un sachet de tabac et de sauge dans chaque jupe. Elle fait attention pour ne rien coudre de négatif sur la jupe.
« Je veux y coudre quelque chose de positif, comme une bénédiction, dit-elle, ajoutant que les gens devraient porter leurs jupes à rubans de façon respectueuse. Lorsque vous portez votre jupe à une cérémonie ou à des événements spéciaux, respectez les enseignements. Lorsque vous portez quelque chose qui représente une Nation, vous faites preuve de respect envers cette Nation et lui faites honneur. »
Joyce est retournée dans la communauté de sa mère biologique de Fort Chipewyan à 19 ans et elle rend hommage aux matriarches dans sa vie, incluant Mme Wilson, grâce à la couture. « En grandissant, je n'avais pas de profond attachement envers mes origines, mais j'ai renoué avec la famille de ma mère, dit-elle. Elle parle de réconciliation et de ce que signifie être fier de ses origines. Tandis que j'établis des liens de plus en plus profonds avec les membres de ma famille et mes racines, je peux dire qu'ils m'ont appris les traditions et ont fait de moi qui je suis. À travers eux, j'ai découvert qui je suis et d'où je viens. Je suis très fière de mes origines. »
Au cours des deux dernières années, Joyce a cousu 250 jupes à rubans, dont l'une portée par Jacquie Moore, avocate générale et secrétaire générale et l'une qui a été offerte récemment à Arlene Strom, ancienne chef du développement durable lors de son départ à la retraite.
« Je porte ma jupe avec fierté et honneur, affirme Jacquie. J'ai rencontré Joyce et vu pour la première fois ses jupes à rubans, qui sont des œuvres d'art, aux Jours du Traité à Fort Chipewyan. Lorsque j'ai reçu en cadeau une jupe à rubans de la part des équipes des Relations avec les collectivités et les Autochtones et de la Fondation Suncor Énergie, je savais d'où elle venait et qui l'avait confectionnée. C'est un superbe cadeau et je pense souvent à Joyce. »
Joyce a appris que tout le monde peut porter une jupe à rubans, tant qu'elle est portée avec les bonnes intentions et avec respect. « Mes mains sont douloureuses à la fin de la journée, mais lorsque quelqu'un porte sa jupe à rubans, je suis pleinement récompensée lorsque je vois son sourire. »